03 juillet 2012

Les Lavieille, une famille d'artistes des XIXème et XXème siècles


06 juillet 2010

Autour du peintre Adrien Lavieille


Adrien Lavieille a été en relation avec plusieurs artistes ou intellectuels, de par sa situation familiale, et de par son caractère très sociable.

Son milieu familial est un milieu d'artistes :

Eugène Lavieille (1820-1889), son père, peintre paysagiste, élève et ami de Corot (voir l'ouvrage Eugène Lavieille, peintre poète de la nature. De "l'école de Barbizon" au pré-impressionnisme) ;

Jacques Adrien Lavieille (1818-1862), son oncle paternel, graveur sur bois très connu de son époque ;

Marie Ernestine Lavieille (ou Marie Lavieille) (1852-1937), issue du second mariage d'Eugène Lavieille, après que celui-ci ait perdu sa première femme (mère d'Adrien) : elle fut peintre paysagiste comme son père ;
Charles Georges Ferville-Suan (1847-1925), mari de Marie Ernestine Lavieille, fils adoptif du peintre Charles Suan, et lui-même sculpteur ;

Marie Adrien Lavieille (1852-1911), née Marie Petit, sa femme, peintre intimiste (portraits, natures mortes) ;
Andrée Lavieille (1887-1960), fille d'Adrien et de Marie Adrien Lavieille, peintre de natures mortes et de paysages ;

Des relations de son père :

Léon Brunel-Rocque (1822-1883), artiste peintre, réalisa un portrait d'Adrien alors qu'il n'avait que 6 ans ;


Eugène Berthelon (1829-1914), fut un élève d'Eugène Lavieille, et devint comme lui un peintre paysagiste ; Adrien Lavieille vint régulièrement lui rendre visite, alors qu'il était déjà âgé, et en 1913, alors qu'Eugène Berthelon est malade, il écrit à sa fille : « Avec lui disparaîtra un de mes derniers souvenirs vivants de ma jeunesse. »

Des amis et relations de sa génération :

Avant tout Auguste Lepère (1849-1918), graveur et peintre, avec qui il fut très lié, et qui l'invita à différentes reprises dans sa maison de Saint-Jean-de-Monts en Vendée (1) ;

Auguste Lepère réalisa en 1912 une gravure représentant Adrien Lavieille en train de peindre à Saint-Jean-de-Monts : Le Paysagiste, qui a été exposée au Salon des Peintres Graveurs Français de 1912, et à celui de la Société Nationale des Beaux-Arts de 1913 ;
(1) L'ensemble des lettres adressées par Auguste Lepère à Adrien Lavieille, ou à sa fille Andrée et à son gendre Paul Tuffrau, (au total plus de 100 lettres), a été confié à l'Institut Nationale d'Histoire de l'Art (INHA).

Henri Paillard (1846-1912), graveur, illustrateur et peintre, très proche d'Auguste Lepère, avec qui Henri Paillard avait créé un atelier à Montmartre ;

Félix Noël (1839-1907), graveur sur bois, très lié également à Auguste Lepère (Auguste Lepère l'hébergea à Saint-Jean-de-Monts, lors des dernières années de sa vie, alors qu'il était malade) ;


Félix Noël (à gauche) et Auguste Lepère, à Saint-Jean-de-Monts.

Ernest Dargent, dit Ernest Yan' Dargent (ou Ernest Yan' d'Argent) (1849-1908), peintre et illustrateur ;

Auguste Gérardin (né en 1849 à Mulhouse), peintre et illustrateur ;

Paul-Joseph Blanc (1846-1904), artiste peintre, Prix de Rome en 1867, nommé professeur à l'École des Beaux-Arts en 1889, et qui participa à la décoration du Panthéon ; Adrien Lavieille travailla dans son atelier lors de sa formation de peintre ;

Pierre Fritel (1853-1942), artiste peintre, mais aussi graveur et sculpteur, avec qui Adrien Lavieille travailla, en 1890, pour les décors muraux de la basilique Saint-Martin de Tours ;

Jean-François Raffaëli (1850-1924), artiste peintre, qui raconta dans ses Promenades au Musée du Louvre (1913) comment il connut Eugène Lavieille par l'intermédiaire de son fils : « Aux environs de 1867, je ne peignais pas encore, mais j'approchais des peintres avec bonheur. J'avais, comme jeune camarade, le fils d'Eugène Lavieille, le bon paysagiste, élève de Corot, qui lui portait beaucoup d'amitié et ne manquait pas, lorsqu'il faisait une vente à l'hôtel Drouot, d'aller lui acheter quelque toile… Le fils me présenta à son père, et le père Lavieille, comme nous l'appelions, me présenta un jour à Corot, rencontré fortuitement dans la rue du Faubourg-Poissonnière. »

Les peintres Adrien Demont (1851-1927) et sa femme Virgine Demont-Breton (1859-1935) : Adrien Lavieille connut Adrien Demont lorsque celui-ci vint travailler dans l'atelier de Joseph Blanc ; par la suite, il fut parmi les amis que le couple reçut dans leur maison de Montgeron (cf. les livres de souvenirs d'Adrien Demont : Souvenances. Promenades à travers ma vie, 1927, et de Virgine Demont-Breton : Les maisons que j'ai connues, tomes 1 : Notre pays natal, 1926, et 2 : Nos amis artistes, 1927) ;

Joseph Bail (1862-1921), artiste peintre ;

Auguste Patey (1855-1930), graveur, Grand Prix de Rome en 1881, nommé en 1896 Graveur général des monnaies, et en 1913 membre de l'Académie des Beaux-Arts ;

Monsieur et Madame Patey, parents de l'artiste (1904) (petite plaque en bronze)

Edmond Sagot (1857-1917), éditeur d'art, et marchand d'estampes et de tableaux (deux peintures d'Adrien Lavieille furent achetées dans sa galerie), avec qui Adrien Lavieille fut mis en relation par l'intermédiaire d'Auguste Lepère ;

Robert de la Villehervé (1849-1919), critique littéraire et poète normand ; il écrivit en 1886 un poème sur La mère Tanisse, peinture à l'huile de Marie Adrien Lavieille ;

Henri Chollet (1840-1917), musicien, professeur de piano, chef d'orchestre et compositeur (il faut rappeler à cette occasion qu'Adrien Lavieille était lui-même très musicien) ; il fut témoin au mariage, en 1878, d'Adrien Lavieille et de Marie Petit ;

"1er Impromptu pour piano", par Henri Chollet (partition dédicacée au peintre Paul Joseph Blanc)

Des architectes, avec qui Adrien Lavieille travailla dans ses activités de peintre-décorateur :
- Jean-Marie Laloy (1851-1927), architecte du département d'Ille-et-Vilaine de 1883 à 1920, avec qui il travailla pour la restauration du Palais de Justice de Rennes ;
- Victor Laloux (1850-1937), Grand Prix de Rome en 1878, avec qui il travailla pour la décoration de la basilique Saint-Martin de Tours ;
- Georges Lisch (1869-1960), qui s'occupa, notamment, de la restauration du château de Vaux-le-Vicomte ;

Parmi les plus jeunes :

Jacques Beltrand (1874-1977), graveur, très lié à Auguste Lepère ;

Jean Alexis Morin, dit Morin-Jean (1877-1940), fils d'amis, archéologue, se consacrant peu à peu, à partir de 1911, à la peinture, l'illustration et la gravure ; auteur d'un Manuel pratique du graveur sur bois (1926) ;

Paul Tuffrau (1887-1973), jeune normalien (promotion 1908) lorsque Adrien Lavieille le connut, et qui épousa en août 1912 Andrée, la fille d'Adrien Lavieille ; reçu au concours d'agrégation de lettres classique en 1911, il consacra sa vie à la littérature, notamment du Moyen Âge, et à l'enseignement ;

Et des amis de Paul Tuffrau :
- André Ruplinger (1889-1914), normalien (promotion 1909) ;
- Bernard Marcotte (1887-1927), poète et conteur, dont la fantaisie répondait bien à celle d'Adrien Lavieille ;
- André Juin (1885-1978), sculpteur originaire d'Angoulême ; ainsi, Adrien Lavieille en janvier 1913 alla voir une exposition organisée à Paris par André Juin et Geroges Mathey : « Il est fâcheux pour notre ami que ses envois ne soient pas plus d'importance, et ce à cause du bagage plus gros de […] Mathey, qui absorbe toute l'attention et la mérite justement – Mais J. apparaît très délicat et plein de promesses aussi – » ;
- Henri Morel (1889-1944), normalien (promotion 1909), qui écrivait à Paul Tuffrau en 1920, à l'annonce de la mort d'Adrien Lavieille : « On ne pouvait avoir que de la sympathie et de l'admiration pour cette âme d'artiste si jeune et si vivante qu'il semblait que ni les années, ni le monde ne comptaient pour lui. »

02 mars 2009

La campagne aux alentours de Paris à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, vue par le peintre Adrien Lavieille


Pour un amoureux de la nature tel que l'était le peintre Adrien Lavieille, les alentours de Paris offraient encore à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle beaucoup de coins de campagne. Et ces endroits, il était assez facile de les atteindre, à pied pour les plus proches, ou grâce au train.
Aussi, Adrien Lavieille est allé souvent se promener avec un carnet de dessins ou son chevalet, autour de la capitale, et ses carnets montrent de nombreuses vues localisées, et datées (de 1878 à 1905) de ces environs de Paris : au nord (Pierrefitte), surtout au sud, en direction de la vallée de Chevreuse (Gentilly, Arcueil, Bagneux, Bourg-la-Reine, Robinson - avec le secteur d'Aulnay, Fresnes, Antony, Wissous, Palaiseau, ou Villebon), mais aussi à l'est (Charenton, le bois de Vincennes, Créteil)...

Ce sont des étendues de champs (où peuvent se voir des meules de foins), ou des chemins, qu'ombragent des groupes d'arbres, ou bien les bords de la Marne, ou de l'Yvette, mais aussi de larges vues, comme depuis le plateau de Gravelle dans le bois de Vincennes, ou bien des carrières... Autant de témoignages de cette époque...


Des carrières à Pierrefitte...



Carrières de Pierrefitte (Saint-Denis), 1878





Le paysage de Gentilly et d'Arcueil est aussi marqué par les carrières, et bien sûr par le passage de l'aqueduc.









Carrières d'Arcueil - Gentilly (1896)
Anciennes carrières d'Arcueil (1896)





Anciennes carrières d'Arcueil, et l'aqueduc d'Arcueil


Le cimetière de Bagneux ne sera ouvert qu'en 1886. Auparavant, des chemins sillonnent la plaine...




Chemin de Bagneux, en 1883

... et la plaine s'étend sur la commune de Fresnes...



Fresnes, 1892





Environs d'Antony, 1892






Des arbres font de l'ombre sur une route de terre...



Entre Verrières et Châtenay, 1889

Un peu plus au sud, c'est au bord de l'Yvette qu'Adrien Lavieille est venu admirer la campagne.



Prairie au bord de l'Yvette. Palaiseau, 1905





Au sud-est de Paris, ce sont les bords de la Marne qui ont attiré les pas d'Adrien Lavieille...



La Marne à Charenton, 1905

La Marne près du pont de Créteil, septembre 1905





Et des hauteurs du bois de Vincennes, la vue s'étend au loin, sur la Marne qui coule en contrebas, et la campagne environnante... car c'est alors de la campagne qui se présente aux regards du promeneur...



De la route du plateau de Gravelle, Bois de Vincennes, 1905

20 septembre 2008


Un livre consacré à Adrien Lavieille est paru en septembre 2008 :

Adrien Lavieille (1848-1920), peintre de la campagne
Éditions Atlantica par Françoise Cambon et Henri Cambon

Quatrième de couverture : Adrien Lavieille (1848-1920), fils du peintre paysagiste Eugène Lavieille, a été tout au long de sa vie un « peintre de la campagne ». Il aimait, en effet, profondément la nature, une nature calme et harmonieuse, que ce soit autour de Paris, en Touraine ou en Bretagne, dans une France encore très rurale.
Cependant, des raisons matérielles l'ont contraint à exercer le métier de décorateur-restaurateur, avec d'ailleurs une compétence reconnue (Palais de Justice de Rennes, Basilique Saint-Martin de Tours, etc.). Il sera perpétuellement déchiré entre cette activité professionnelle et son amour pour la peinture, mais il a laissé derrière lui une œuvre abondante (peintures et dessins), riche et attachante.

03 avril 2006

Adrien Lavieille (1848 - 1920)


Adrien Lavieille est né le 29 mars 1848, à Montmartre (Seine). Son père, Eugène Lavieille (1820-1889), qui était peintre paysagiste, a été élève et ami de Camille Corot (1796-1875), et a fait partie de l'École de Barbizon. Adrien Lavieille tenait son prénom de son parrain, le graveur Jacques Adrien Lavieille (1818- 1862), frère aîné de son père. La mère d'Adrien est morte le 4 août 1848, quelques mois après la naissance d'Adrien, qui ne l'a donc pas connue... Eugène Lavieille s'est remarié en 1852, et aura de cette deuxième union une fille Marie-Ernestine, qui deviendra peintre, et épousera le sculpteur Charles Georges Ferville-Suan (1847-1925), et un fils Joseph, qui mourra à 29 ans. Très tôt, Adrien est tenté par la peinture – même si la musique l'a aussi attiré (et il aimera toute sa vie chanter des airs de musique classique). Son père – qui lui-même aura été confronté aux difficultés d'une vie consacrée à la peinture, en particulier sur le plan financier – essaiera de dissuader Adrien d'avoir une telle orientation. Aussi – tout en mettant Adrien en contact avec un de ses amis, Joseph Blanc, qui lui donnera des cours de peinture – il lui conseille de trouver un métier dans le domaine de la décoration et de la restauration. Malgré ses fortes réserves, Adrien suivra ce conseil, pour des raisons matérielles, et pour lui permettre de fonder un foyer avec Marie Petit, artiste peintre également – qu'il épousera en 1878. Mais ce faisant, il renonce à son rêve de n'être que peintre, en particulier peintre de la nature – et il reviendra régulièrement sur ce rêve avorté…, avec malgré tout toujours l'espoir de peindre, un jour, le chef d'œuvre - comme il le disait en souriant -, ou tout au moins une ou deux choses importantes, bien d'aplomb, qui m'auraient fait connaître… Il ne s'agit pas là d'un souhait de "gloire", mais plutôt de reconnaissance des possibilités qu'il sentait en lui (ainsi, dès 1893, il écrivait à Marie, sa femme : Je me sens pourtant quelque chose et crois encore pouvoir le prouver quelque jour), et aussi de ré-assurance, car à côté de cette confiance en ce qu'il pensait être en lui, il y avait une très grande modestie, un manque de certitude sur la valeur de ce qu'il faisait. Mais en mai 1908, il constatait : J'ai tant espéré, et ai si peu obtenu…

Adrien exercera donc toute sa vie le métier de décorateur et restaurateur, avec d'ailleurs un talent reconnu, travaillant aux travaux de la basilique Saint-Martin de Tours (1890), à la restauration du château de Vaux-le-Vicomte (1893-1911), du Palais de Justice de Rennes (1894-1908), de l'Hôtel de Lauzun situé quai d'Anjou à Paris (1914), de La Monnaie (1914)… Ce métier ne lui laissera pas tout le temps dont il aurait voulu disposer pour la peinture, et souvent, il en est réduit à ne faire que du paysage mental, comme il le dit lui-même. Cependant, il essaiera toujours de s'échapper de son dur labeur pour aller peindre - ou dessiner - dans la campagne, au milieu de cette nature qu'il aimait tant. Ainsi, il peindra ou dessinera les paysages qu'il voyait[1], les arbres, les cours d'eau, les petits chemins qui s'ouvrent sur un champ, des habitations dans un village…, dans les environs de Paris - où il était encore relativement facile de trouver de la pleine campagne - (Arpajon, Bagneux, Bourg-la-Reine, Fresnes, Arcueil, Palaiseau, Montgeron, Charenton, Meulan, Moret-sur-Loing…), près de Tours (en 1890, alors qu'il travaille à la basilique), dans l'Eure, en Bretagne, près de Rennes (Laillé, moulin du Boël), ou de Cancale, à Saint-Jean-de-Monts et ses environs où le peintre et graveur Auguste Lepère (1849-1918), avec lequel il est très lié, l'invite dans sa maison, à Vendôme où sa fille et son gendre étaient venus habiter, et où, alors que sa femme est morte en 1911, il viendra peindre en 1913, puis, au début de la Première Guerre mondiale, rejoindre sa fille qui est restée seule, son mari étant parti sur le front. Son œuvre est d'ailleurs un témoignage très évocateur de la France de son époque, qui par la suite va se transformer de plus en plus rapidement...

Sa femme, Marie, était aussi artiste peintre dans l'âme, tournée elle vers les natures mortes et les portraits, et Adrien sera très admiratif de ce qu'elle fait, et l'encouragera dans cette voie de l'art, comme dans cette lettre écrite en 1876, avant leur mariage : J'ai été très heureux le jour du vernissage au Salon quand j'ai aperçu votre tableau. J'ai été réellement enchanté de sa tenue. Pour moi, c'est un des meilleurs portraits de l'exposition. Quelques amis m'en ont parlé et ont confirmé ainsi mon appréciation… Vous ne pouvez manquer de prendre une place sérieuse un jour parmi les peintres… Mon impression quand j'ai vu votre œuvre a été très forte. Ça m'a fait autant de plaisir que si j'en avais été l'auteur. Malheureusement, Marie - qui avait beaucoup de talent - sera très atteinte par la mort très jeune, à tout juste 6 ans, de leur fils, le petit Pierre, et les tableaux qu'elle peindra par la suite ne seront plus tout à fait les mêmes… Dans son amour de l'art, et sa confiance pour les siens, Adrien poussera aussi leur fille, Andrée, qui, comme ses parents, son grand-père paternel, la demi-sœur de son père, se tournera vers la peinture (peintures à l'huile, ou avec le temps des aquarelles, de natures mortes, d'intérieurs, de paysages…)[2]. Il est allé au Salon des Artistes français de 1912 où Andrée a exposé, et il lui écrit qu'il a rencontré Wogel qui m'a parlé de toi (tu ne le connais pas), mais il a vu ta peinture au Salon et en a fait de grands éloges. …Il te faut rester sur les bonnes positions acquises, ce ne sera qu'une question de temps, mais tu dois arriver, tu arriveras : je compte sur toi pour relever le drapeau que nous avons un peu laissé tomber dans notre famille.
Adrien Lavieille a poursuivi la tradition des peintres paysagistes du XIXème siècle, et il l'a fait sans théorie particulière… En fait, il a voulu traduire, avec ses sentiments, qui étaient de simplicité, de vérité, de bonté, son émerveillement devant la beauté de la nature qu’il avait sous les yeux, surtout de la campagne, avec ses lumières changeantes et ses couleurs, qui lui renvoyait un calme auquel il aspirait, mais qu’il n’a guère pu connaître durant sa vie…, et ses nombreuses peintures, et aussi ses dessins, révèlent ses qualités par le choix des sujets, la composition, le cadrage, les nuances… Cependant, son œuvre est beaucoup plus diverse qu'il n'y paraît lors d'une première vision. Certains de ses tableaux semblent trop "sages". Toutefois, on retrouve dans nombre d'autres des échos des mouvements de peinture qui marquent la fin du XIXème siècle et le début du XXème siècle : les couleurs et le sens de la lumière des impressionnistes, ou des grandes plages de couleurs, en aplats, évoquant le fauvisme, ou même une peinture à grands traits, rappelant l'expressionisme... Ainsi, il y avait en Adrien Lavieille beaucoup de potentialités. Il s'en rendait lui-même compte, et cette conviction l'a soutenu tout au long de sa vie dans sa quête de réaliser une œuvre importante, correspondant à ses aspirations, à son exigence vis-à-vis de lui-même.
Mais il n’a pas pu s’épanouir, se réaliser, non réellement soutenu par son père (que cependant il admirait beaucoup), devant faire face à la fragilité de sa femme, qui elle aussi n'avait pas pu vraiment s'accomplir sur le plan artistique, et qui était une nature plutôt dépressive, sûrement aussi atteint – comme sa femme – par la mort du petit Pierre, confronté aux problèmes financiers, qui l’ont conduit à continuer toute sa vie ce métier de décorateur, qui lui a pris le temps qu’il n’a pas pu consacrer à sa peinture… Ainsi, étouffé par ces différents facteurs – qui cependant l’ont aussi forgé, ont exacerbé sa sensibilité –, toutefois, par moments, il redevenait lui-même, un vrai artiste, actif, plein de fougue et d’enthousiasme, content de la vie, quand il pouvait "s’échapper", aller peindre au milieu de la nature, avec son "bizarre attirail", tel qu’Auguste Lepère, l'ami fidèle, qui croyait en lui, l’a montré dans sa gravure de 1912, Le Paysagiste.

C'était un véritable artiste, dans toute l'acception du mot, très modeste, trop modeste souvent; je lui reprochais de ne pas savoir s'imposer comme il aurait dû le faire, écrivait, au moment de la mort d'Adrien Lavieille en 1920, l'architecte Georges Lisch.
Un artiste entier, vrai, attachant…

[1] Pas de personnages, pas d'animaux, dans les œuvres d'Adrien, qui est vraiment un peintre " de paysages ".
[2] Voir http://andree-lavieille.blogspot.com/
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Peintures et dessin présentés :
- Ferme à l'échelle,
peinture à l'huile (sur toile) (25,7 x 33,7 cm)

- L'entrée d'un hameau, 1892,
peinture à l'huile (sur toile) (23,8 x 31,6 cm)

- À l’entrée d'un village,
peinture à l'huile (sur toile) (31 x 39 cm)

- Moret-sur-Loing (Seine-et-Marne),
peinture à l'huile (sur toile) (17,7 x 37,4 cm)

- Vallée encaissée dans les rochers,
peinture à l'huile (sur toile) (25 x 36,5 cm)

- Chemin dans une forêt,
peinture à l'huile (sur toile) (34 x 46,4 cm)
- Maison derrière une clôture,
peinture à l'huile (sur toile) (24,8 x 33,7 cm)

- Près d'une forêt,
peinture à l'huile (sur toile) (25,8 x 34,2 cm)

- Chemin dans les dunes (Saint-Jean-de-Monts, en Vendée),
peinture à l'huile (sur carton) (23,8 x 33 cm)

- Environs de Meulan, en 1876 (Seine-et-Oise),
dessin (26 x 20 cm)

- Moulin du Boël (près de Laillé, au sud de Rennes),
peinture à l'huile (sur bois) (18,8 x 30,6 cm)
- Dans le Vendômois (en 1913 ou 1914),
peinture à l'huile (sur carton) (26,7 x 34,8 cm)
- Souvenir de Montmartre, 1879,
dessin (18 x 23,3 cm)

Photographie d'Adrien Lavieille
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Biographie d'Adrien Lavieille

1848 Naissance le 29 mars 1848 d’Adrien, Henri Lavieille, à Montmartre (Seine), issu du mariage d’Eugène Antoine Samuel Lavieille, peintre paysagiste, et de Louise Alexandrine, Caroline Gonon. Son parrain sera son oncle paternel, Jacques-Adrien Lavieille, graveur.

Vers 1872 Entrée dans une entreprise comme employé décorateur. Rencontre d’un ami de ses parents, Jean-Jacques Petit, peintre décorateur, et de sa fille, Marie.

1877 Il entre dans l'entreprise de décoration de Jean-Jacques Petit, pour avoir une situation stable lui permettant d’épouser Marie Petit – mais du coup en renonçant à son rêve d’être uniquement un artiste peintre.

1878 Mariage avec Marie Petit le 10 avril, à Paris.

1879 Naissance le 11 janvier de leur premier enfant, Pierre.

1885 Le petit Pierre est enlevé brutalement par le croup, le 23 mars.

1887 Naissance le 11 septembre d’une petite fille, Andrée [1].

1890 Il travaille à la décoration de la basilique Saint-Martin de Tours.
Il peint dans la campagne de Tours.

1893 Début de sa participation aux travaux de restauration et de décoration du château de Vaux-le-Vicomte (où il travaillera de façon épisodique jusqu’en 1911).

1894 Deux mois passés avec Marie et Andrée à Laillé, en Bretagne, au bord de la Vilaine. À partir d’octobre, il travaille à la restauration du Palais de Justice de Rennes. Cependant, il peut aller peindre près de Laillé.

1896 Il travaille de nouveau au Palais de Justice de Rennes.

1898 Il expose au Salon des indépendants Après-midi au Boël (Ille-et-Vilaine)

1901 Il est nommé "Officier d'académie" [2], à l'occasion de l'Exposition Universelle de 1900, où ses travaux de restauration du Palais de Justice de Rennes ont été présentés.

1902-1903 De nouveau au Palais de Justice de Rennes.

1906 Retour au château de Vaux-le-Vicomte.

1908 Il revient travailler à la restauration du Palais de Justice de Rennes.

1911 Décès de sa femme, Marie, le 13 mars 1911.
Il retourne travailler à la restauration du château de Vaux-le-Vicomte.

1912 Mariage de sa fille, Andrée, avec Paul Tuffrau, le 17 août 1912.
Il va passer en septembre quelques semaines à Saint-Jean-de-Monts, en Vendée, chez le peintre et graveur Auguste Lepère, avec lequel il est très lié. Il peint dans les alentours avec Auguste Lepère. Auguste Lepère fait un portrait de lui dans une gravure intitulée Le Paysagiste, qu’il lui dédicace.

1913 Il peint dans la région de Vendôme, où il est venu passer 3 mois chez sa fille et son gendre.
Il expose au Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts En haut de Robinson (Seine) (n° 740).
Il séjourne de nouveau chez Auguste Lepère, à Saint-Jean-de-Monts, où il peint.

1914 Il participe à des travaux de restauration et décoration à l’Hôtel de Lauzun, quai d’Anjou à Paris (janvier-mars), et à La Monnaie (avril-juin).
Il est à Paris quand la 1ère Guerre Mondiale éclate. Il rejoint sa fille désormais seule à Vendôme, son mari ayant été appelé sur le front.

1914-1918 Il reste avec sa fille à Vendôme, en dehors de quelques mois passés avec elle à Paris. Sa santé devient plus fragile.

1919 Il suit sa fille et son gendre à Chartres, où son gendre, de retour du front, a été nommé professeur au lycée Marceau.

1920 Décès le 5 février 1920, chez sa fille et son gendre, à Chartres.
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Expositions
1885 Salon des Artistes Français : Un matin à La Vallée - Eure [3]
1898 Salon des Indépendants : Après-midi au Boël (Ille-et-Villaine)
1913 Salon de la Société Nationale des Beaux-Arts : En haut de Robinson (Seine)
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Lieux où Adrien Lavieille a peint, ou réalisé des dessins
(lieux et dates non exhaustifs) :

Paris :
Montmartre (1877, 1879),
quartier des Gobelins (1887), boulevard Blanqui (1905), parc de Montsouris

Région parisienne :
Bois de Vincennes (de la route du plateau de Gravelle) (1905),
Environs de Meulan (1875, 1876),
Arpajon (1876),
carrières de Pierrefitte (1878),
Bagneux (1883, 1884), Bourg-la-Reine (1886, 1888), Massy (1887),
Arcueil (1886, 1896, 1905), Charenton (1886, 1905), la Marne près du pont de Créteil et de Saint-Maurice (1905), Fresnes (1892, 1905), Villebon (1905), Palaiseau (1905),
Robinson (1905), Gentilly-sur-Seine (1905), L'Hay-les-Roses (1905),
Montgeron (1906), Châtillon, Fontenay-aux-Roses,
Champagne (Seine-et-Marne) (1898), forêt de Sénart, Courpalay,
Fontainebleau (1898), Moret-sur-Loing

Région du Bremien, près de Nonancourt, dans l'Eure (1883-1885, 1889, 1905)

Environs de Tours : Vallée de Courcay, Monts (1890)

En Bretagne : 
Environs de Rennes (1894, 1897) : Laillé, Moulin du Boël, Bourg-des-Comptes
Près de Cancale (1900)

Saint-Jean-de-Monts (1912, 1913) (route de Saint-Gilles, Vert Logis…)

Vendôme et ses environs (1913-1915)
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Travaux de décoration et de restauration auxquels a participé Adrien Lavieille :

Basilique Saint-Martin de Tours (1890)
Château de Vaux-le-Vicomte (1893-1912)
Palais de Justice de Rennes (1894-1908) (1ère et 2ème Chambres Civiles et Grande-Chambre)
Palais du Sénat, Paris (juillet 1894)
Ecole des Beaux-Arts (1910)
Mairie du IIIème arrondissement de Paris (cabinet du maire) (1910)
Hôtel de Lauzun à Paris (quai d'Anjou) (janvier - mars 1914)
Hôtel de la Monnaie à Paris (quai Conti) (avril - juin 1914)
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Des renseignements complémentaires peuvent être trouvés dans le livre concernant sa fille, Andrée Lavieille, paru en mars 2007 (Éditions Atlantica), réédité en 2013 (Lelivredart) :
Dans le sillage des impressionnistes, Andrée Lavieille (1887-1960)
par Françoise Cambon et Henri Cambon















[1] Andrée Lavieille deviendra peintre, elle aussi.
[2] Journal officiel de la République française, 11 février 1901 (p. 1038 et 1048).
[3] Une reproduction du tableau a été publiée dans La Chronique Parisienne (n° 257 daté du dimanche 12 juillet 1885).